Religion et étiquette en aïkido

Les règles de politesse japonaise sont essentiellement inspirées du shintoïsme et de la culture chinoise. Le terme « reigi », étiquette en japonais, est composé de caractères signifiant « ce qui gouverne la célébration du sacré » et qui sera plus tard étendu aux relations humaines et à leur hiérarchie. Roland Barthès dit d’ailleurs : « si je dis que là-bas la politesse est une religion, je fais entendre qu’il y a en elle quelque chose de sacré ; l’expression doit être dévoyée de façon à suggérer que la religion n’est là-bas qu’une politesse, ou mieux encore : que la religion a été remplacée par la politesse ».

L’étiquette est présentée comme une condition sine qua non de la survie en société, une façon d’exprimer, au moyen du corps, l’ordre de l’univers. Les instincts sont dépourvus de connotation morale : ils existent, simplement. L’étiquette permettrait de les contrôler, de développer un calme et une détermination intérieure. Elle sert à connaître sa place dans la hiérarchie, ici, en aïkido, entre le maître et son disciple, les hauts gradés et les débutants, les âgés et les jeunes, comme on le verra en se penchant sur l’organisation du dojo. Kisshomaru Ueshiba dit ainsi : « sous une forme moderne, l’aïkido sublime l’essence même de la tradition ».

Le salut est considéré comme extrêmement important au Japon, les salariés suivent un entraînement pour le faire correctement. Il est différent selon le genre sexuel, l’âge, la place dans la société. Plus le salut est prolongé et bas, plus il dénote de l’émotion et du respect. Tout un enchaînement est à respecter lors du salut même, que ce soit depuis la position debout ou assise – il est de rigueur d’être à genoux lorsque l’on écoute les explications de l’enseignant. La main gauche doit glisser jusqu’au sol d’abord, doucement. La main droite revient après la première, laissant la possibilité de dégainer un sabre. Il est important de regarder la personne que l’on salue, sauf pour le kamiza ou une personne que l’on tient à honorer particulièrement : si l’on salue, et donc baisse sa garde, en fermant les yeux, on exprime une grande confiance en la personne à qui le salut est destiné.

Le salut avec une arme est d’ailleurs encore plus spécifique. Le est porté par la main droite, la pointe légèrement vers l’avant, avec l’idée de pouvoir porter un coup à la gorge en cas d’urgence ; mais lors du salut, il est basculé d’un mouvement de poignet pour qu’il soit visible qu’on ne puisse plus attaquer. Le sabre est posé à droite, la garde au niveau du genou, de manière à pouvoir appuyer ce dernier sur la poignée et à ne laisser que le fourreau à quelqu’un essayant de tirer l’arme par derrière. Lorsque l’on reçoit une arme, il faut le faire avec les deux mains, comme lorsque, plus généralement, on reçoit un cadeau au Japon. La recevoir avec une seule main, mis à part si c’est vraiment justifié, est pris comme de la négligence.

Bien-sûr, ces règles sont indicatives ; elles varient selon les clubs, sont plus ou moins rigoureuses, mais servent ici à montrer l’influence de la culture japonaise derrière les gestes reproduits dans le dojo.

Dans les arts martiaux, l’étiquette est un langage. Plus exactement, l’étiquette est un langage, quelle que soit la situation, mais c’est encore plus visible dans la pratique occidentale des arts martiaux japonais, puisque l’application consciente de cette communication silencieuse la rend bien plus visible que les gestes que nous faisons et recevons machinalement, jour après jour et depuis notre enfance, sans y penser.

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